la vie

18.8.06

Le plus beau des cadeaux

J'avais écrit, il y a quelques années, un texte dans lequel je racontais un échange avec l'une de mes filles au téléphone. J'–'avais découvert que le plus beau des cadeaux qu'elle souhaitait recevoir de ma part ne portait pas sur un objet, un nouveau vêtement, un bijou ou un parfum… Mais simplement sur un peu plus de ma présence, de mon attention, de mon temps. Et le souhait d’une confirmation de ma part, qu'elle était importante pour moi, que le lien entre elle et moi existait toujours, qu'il n'était pas dévitalisé. J'ai trouvé que c'était une belle demande et je ne l'ai jamais oubliée.

Parfois et malgré notre écoute à leurs demandes ou leurs attentes, malgré toute l'attention, les manifestations d'amour ou d'intérêt que nous pouvons avoir à l’égard de nos enfants ou de nos proches, il existe des manques. Ceux-ci s’expriment par des reproches ou des accusations qui ne sont pas toujours bien reçues par nous. Même si nous savons que derrière tout reproche ou mise en cause, il y a une demande. Un besoin qui ne sait se dire plus directement.

Nos enfants, devenus adultes, s'éloignent ou se rapprochent de nous au gré des séquelles d'un passé souvent chargé de contentieux. Autour de leurs questionnements intimes, de leurs choix de vie, ou encore de ce qui est réveillé en eux de leur histoire, par les difficultés du quotidien. Ainsi une demande d'attention, une réclamation de plus d'amour de leur part (ou de la nôtre) peuvent être entendues autour de deux messages qui peuvent sembler antagonistes mais qui ne s'annulent pas. Deux messages contradictoires comme souvent un ex-enfant, devenu adulte, est capable d'en envoyer à l'un ou l'autre de ses parents.

Le premier des messages peut s'entendre de la sorte : « Je ne suis plus une enfant. Arrêtez de m'appeler pour me demander si je vais bien. Ne me demandez plus si j'ai besoin de quelque chose. Ne m'offrez plus de cadeaux. Je suis autonome. Je n'ai plus besoin de soins, de prise en charge. Je sais faire face à mes besoins, je m'offre ce que je veux… Et d'ailleurs je vous en veux parfois car vous ne m'avez pas toujours compris, pas aimé comme je l'aurais souhaité, pas reconnu tel que j'aurais voulu l'être… Je ne veux pas lâcher encore tous mes reproches ou mes accusations, mais entendez au moins que j'ai besoin de votre attention, de votre présence, de votre amour, même si je suis capable de les refuser… »

• L'autre message pourrait être : « J'ai quand même besoin de vous, vous êtes importants pour moi. J'ai besoin de manifestations d'amour, de tendresse, de contacts directs de votre part. Mais je ne veux pas en demander. C'est à vous de l'entendre et d'y répondre, en prenant même le risque de mes refus et de mes réticences… »

Beaucoup de demandes que nous font nos enfants - devenus adultes - sont chargées de ressentiments, de reproches, de tentatives de culpabilisation, de reliquats d'insatisfactions passées. Je crois qu'au travers de quelques-unes de ces demandes contradictoires, les ex-enfants vérifient en fait le lien. Ils s'assurent qu'il est toujours là, ils vérifient sa solidité, en tirant dessus, quelquefois même très violemment !

Alors, si nous avons compris qu'il s'agit pour eux de vérifier le solidité du lien aux parents, nous pouvons les remercier de nous avoir alertés. Nous pouvons leur témoigner que nous sommes capable de les accueillir et de partager de la tendresse avec eux. Ils prendront notre invitation ou pas : cela leur appartient.

A notre bout de la relation, nous leur avons témoigné que nous avons entendu l'essentiel du message : l'attente et la demande. Que nous ne nous laissons pas paralyser par l'autre partie : le refus ou le rejet. Ainsi nous leur confirmons que le lien est toujours là, bien vivant. Qu'il n'est pas blessé par les contradictions et les ambivalences, qu'il est toujours disponible… à notre bout de la relation.

Témoigner que nous sommes toujours là, quel que soit leur âge et qu'ils sont toujours nos enfants.